samedi 28 décembre 2013

bienvenue à Mons-les-bidounes le trajet dure une heure essayons d’en décrire l’itinéraire les bidounes donc sous col croisé de shetland rose chiné les bidounes la fraicheur humide à la place quand la porte se claque sur la rue la vitre tremble à cause d’un gnon de fin de soirée a-t-elle vraiment une voiture peut-être a-t-elle déposé sa voiture en train ce qui expliquerait pourquoi elle n’en a pas aujourd’hui c’est vraisemblablement impossible donc elle abuse je marche à grandes enjambées pour le métro qui est presque le dernier et qu’il faut attendre de toutes façons puis le terminus je laisse le petit pont de bois sombre sur mon flanc droit je continue sous l’éclairage public pour pénétrer l’espace utopien par la zone syrienne avec ses terrasses imaginées sous l’ombre des pins parasols dans une région sans pin ni soleil les terrasses en surplomb d’une mare aux canards artificielle aucun marcheur sur la voie balisée pour la marche un spot de pêche sans pêcheur un autre jour je m’y assied pour lire mais pas tranquille tout droit tout plat long comme un désert qui laisse la soif en arrière on passe dans l’ombre d’une masse immense qui repose sur la gauche comme la sépulture de King-Kong dans le Bois des Dames puis la brume des marais puis le marais immobile comme une membrane sourde d’où peut surgir une créature à dos d’écailles voire même des vagabonds c’est la nuit des créatures King-Kong puis la créature à dos d’écaille puis la créature avec les bidounes je marche guidé par son étoile qui est le soleil à la lueur des lampions de la gare jusqu’à la zone portuaire que l’on devine de loin grâce à son sémaphore magnétique on entre par l’espace des machines avec ses cheminées de combustion le cargo amorce le virage mon cargo avec ses traîtres qui se donnent en spectacle derrière les hublots de loin on devine des mines de sacristains des mines de banlieusards des mines de routines je descends l’avenue je passe devant la niche de la fée aux rubans j’aimerais contourner la niche pour regarder ses ailes à travers la paroi vitrée pour voir comme elles sont belles mais c’est trop tard

dimanche 22 décembre 2013

Sophie j’aimerais que nous l’appelions Sophie je suis frappé par la beauté de cette idée idiote le principe même de l’illumination je sais qui est Sophie je sais ce que représente Sophie mais il me semble que nous nous trouvons en présence d’une manifestation paranormale pour en savoir plus prenons le dictionnaire même dans l’obscurité la plus profonde on peut tout faire dans l’obscurité la plus profonde même de la plongée sous-marine à l’horizontale le canard à l’indienne mais c’est épuisant le dictionnaire avec l’écorce de sa couverture couleur d’écureuil Sophie donc la reine de la forêt la déesse de la forêt la princesse de la forêt je ne me souviens pas rappelons nous qu’il fait nuit je reste donc sur l’illumination et je pleure sur la beauté de cette idée idiote

samedi 21 décembre 2013

celle que je sers dans mes bras et celle qui déboule par le haut sur le siège d’une moissoneuse-batteuse pilotée par le chef de camp sont la même les mêmes bouclettes la même poitrine le même parfum la semaine passée puis la vie depuis bien sûr il y a des rencontres dans la vie depuis mais il s’agit d’autres personnes bien sûr il y a tout le reste de la vie depuis mais il ne passe pas il reste en travers de la gorge il n’a pas été digéré il demeure en attente il est dans le passage il lui manque l’agrément du souvenir nous consacrons la semaine à bavarder autour d’une orangeade qui est le jus du soleil et puisque le temps de nous quitter vient nous nous étreignons par politesse nous nous étreignons pour nous remercier mutuellement nous nous étreignons pour nous imprimer mutuellement dans la matière molle de nos corps

vendredi 13 décembre 2013

commençons par les ruines pas de verdure les ruines d’ici sont des ruines d’Empire des angles de béton cassé qui forment des tas parsemés de bidons noircis par les miséreux de passage des barres d’habitations collectives sur le square de schiste un arbre enterré par la tête avec les racines immobiles dans le crépuscule d’août gros plan sur la tête d’un gamin posée à même le béton comme un débris de statue la pellicule saturée par la lueur blanche qui imprègne la brume un filet de sang coule du front creuse une rivière dans la tignasse peroxydée jusqu’à l’œil qui se met à pétiller sous l’effet de la sauce tomate la fille est venue raconter cette histoire la fille boit une bière avec les amis et ses cheveux changent de couleur au fil du récit

dimanche 8 décembre 2013

sensucht que serions nous devenus ce n’est pas facile avant de pouvoir passer de l’autre côté il y a tous ces camions et toutes ces voitures tous ces pare-chocs encore chromés au pays c’est les fifties tout le monde veut des blues jeans ça dure depuis plusieurs jours rien ne bouge c’est l’immobilisme avant le basculement c’est dans l’air tout le monde a compris ça je ne saisis pas la différence fondamentale entre le lait le jus d’orange le coca-cola l’eau mais j’ai compris ça comme tout le monde commençons par les ruines le portail immense est écrasé par la verdure on ne reconnait plus rien le pont de singe n’est pas dans l’image il doit subsister des débris de planches et de chaîne sous les branches un skateur s’élance sur un toboggan minuscule jadis grand comme une église les trucks glissent sur l’arrête d’une table de buvette rouge il suffit d’un coin pour que la tête s’ouvre comme le front blond du polonais tombé du pont de singe quand nous sommes venus en autocar le parking à autocars est plein ça vient du pays entier pour les enfants et pour les fleurs à repiquer dans les jardins de corons qui dans leurs couleurs et leur folie sont les plus beaux jardins du monde