lundi 20 octobre 2014


c’est un océan cylindrique sa surface a la forme d’un goulot il est ancré dans la terre dorée qui se prolonge vers l’avant comme les deux flancs d’un canyon c’est une terre sous la surface de laquelle on devine la circulation des rivières on la voit battre de loin l’horizon est un triangle de ciel blanc terre mer ciel s’inscrivent dans la profondeur de la levure se déverse dans la mer pour alimenter un satellite paumé-yoyo au bas de caisse rongé par le temps la bise souffle sur la levure qui déborde sur les flancs du canyon qui ressemble un instant aux falaises de craie de la côte anglaise la pluie bientôt viendra redonner à ce paysage toute sa torpeur

jeudi 16 octobre 2014


le vélo l’air doux le vélo qui cricrique quand on roule et qui freine quand on recule une roue avant dépasse du fossé est-ce Rembrandt est-ce Picasso sur place le son d’ambiance général est teinté d’épices les jeunes boivent du vin rouge comme les vieux chez moi des histoires de danseuses qui se frottent les poitrines jusqu’à ce que l’électricité advienne des histoires de main baladeuse dans l’escalier des toilettes l’ambiance reste paisible et insouciante à l’abri d’une toile de tente on sait la tension à l’extérieur comme à l’abri de la peau de tambour du ventre ce tremblement qui enfle ces éclats de soleil suivis de pages noires sont l’amour qui gronde l’amour insoupçonné dont on ne perçoit que l’ombre inquiétante la manifestation d’un territoire inimaginable 22 ans plus tard dans la file d’attente qui s’étire depuis un guichet en bois comme dans l’ex-bloc de l’Est deux anges en appui sur leur aileron le regard au Nord le regard clair sans aucune ombre à l’horizon elles sont les oiseaux qui traversent la pellicule surexposée par la chaleur de l’été 76 les aisselles au vent les orteils pointés vers l’asphalte deux anges incognito dans une file d’attente de l’Europe peut-être en va-t-il de l’amour comme des rats une étoile qui file sur le trottoir dans un sifflement aigu annonce peut-être la révolte qui grouille en sous-sol

mercredi 8 octobre 2014


l’humide cour pavée la porte bascule dans un espace sombre comme un magasin d’antiquités exigu comprenant un cabinet d’aisance qui a la blancheur d’un rajout tardif et l’amorce d’un large escalier de bois noir et poussiéreux une rampe ancrée par un gros pommeau-boule l’escalier craque sous les pieds on entend le bois s’effriter et tomber dans les bacs à graines de la boutique du rez-de-chaussée sur le palier la poupée seule ses bras sont frêles comme des bâtons ancrés à hauteur des épaules et ses cheveux sont si fins que l’on croirait sa queue de cheval composée de deux alors qu’ils sont vraisemblablement plusieurs dizaines de milliers le temps épaissit parfois les cheveux mais jamais les dents la revoici donc dans la file d’attente avec sa robe imprimée qui se défronce à peine au passage de ses poitrines ses jambes sont les pilonnes de dieu érodés par des siècles de travail dont l’âge précis peut se lire sur la tranche des rondins qui lui soutiennent les talons

mercredi 1 octobre 2014


le pourtour de la baignoire est enduit d’huile d’olive de sirop de sucre d’eau de fleur d’oranger depuis que Nabila est passée comme tous les jeudi on s’y laisse glisser sans savoir ou on va presque comme pour rire en dépit de tout même si on rechigne à regarder dans le siphon on sait très bien qu’il abrite ce qu’il a conservé de plus rance comme les croutes de camembert qui piquent l’orgueil qui aiguillonne la jalousie envers les plus petits comme quand on déteste ceux-ci parce que cela comme quand on déteste ceux-là aussi sachant tout ça tout le temps mon pied dérape quand même sur la faïence jusqu’à me rattraper au dessus de l’abime dans une position de jiu jitsu que je stabilise par une gestuelle péremptoire s’agirait-il d’une fuite en tous sens d’une fuite par explosion qui projette des boulons alentour dans ceux qui ont la malchance d’être les plus proches