samedi 28 septembre 2024

les doigts de Schubert tricotent sur la nuque d’Anne-Charlotte un bretzel emmêlé de vagues au nombre de 3 qui se dilueront au bout de deux heures à peine dans le flux de l’air conditionné Schubert ne tient pas en place ses longues jambes s’ouvrent puis s’étirent droit devant au point de faire saillir les muscles de ses mollets son buste se vrille à droite puis à gauche pour saisir à pleines mains le dossier du fauteuil comme pour l’arracher avant le concert de Vince Taylor à l’Olympia Schubert s’allonge dans le lit du Gange où l’on vient de toutes les régions de la terre et de l’être pour y dissoudre ses peines et ses désirs en s’immergeant tout entier jusqu’au tréfond et c’est lorsque que les doigts viennent au contact de l’inimaginable dans le flou de la chaleur entre solide et liquide que s’écoule une nouvelle rivière incroyablement bleue

dimanche 15 septembre 2024

Walker longe le corridor à grandes enjambées vers le Point Blank mais ses pas restent sourds dans sa tête l’image d’un gamin en tricycle les roues creusent l’épaisseur de la moquette aux motifs géométriques le corridor s’ouvre sur une large pièce d’où émane une voix calme et solide something is happening here sur le mur du fond un écran projette des croix jaunes qui sont en réalité des chapelets de perles d’or la femme aux long cheveux noirs assise derrière son pupitre vante les vertus des brisures de symétrie pour véhiculer la lumière

mardi 10 septembre 2024

Anita se met au travail dans l’antre dorée qui s’ouvre sur la ville grise par un rideau de tôle froncée couverte de peintures bigarrées sur la droite un trône en velours à franges vertes sur la gauche un autel laqué de jaune puis cette stèle que l’on imagine taillée dans le rumsteak d’un arbre et ainsi de suite jusqu’au fond de la caverne dont les parois sont parsemées de chisteras à fond miroir qui nous retournent en pleine face tout droit dans l’infini avec la vigueur d’une gifle des frères Etcheverry Anita s’affaire avec des burettes visqueuses qui sécrètent un liquide bien plus épais que l’huile de coude puisqu’il ne s’agit pas de fluidifier la fuite du temps mais au contraire de figer l’instant dans la valse des planètes à l’image des paroles légères qu’Anita prononce dans le combiné téléphonique et qui s’approfondissent en s’incrustant dans la viande magnétique des années from her to eternity

vendredi 6 septembre 2024

une route en descente où tout roule jusqu’à l’instant où le courant s’éteint et plonge l’habitacle de la voiture dans une nuit profonde comme l’intérieur d’un bathyscaphe l’unique source de lumière est celle du cadran phosphorescent d’un radar détecteur d’engin qui n’indique que la vitesse figée dans le temps de l’automobile aveugle autour le monde continue et il est impossible de se garer sur le bas-côté puisqu’on ne sait pas de quel côté il se trouve et il est impossible de stopper le véhicule qu’on imagine dériver au milieu du trafic d’une voie rapide on peut juste tourner le volant un peu à droite un peu à gauche en serrant les fesses et raidissant l’échine comme dans les autos-tamponnantes puis la lumière soudainement revient au milieu d’une brume matinale on se découvre en marche arrière à contresens au sein d’une circulation aussi docile qu’une image d’Épinal de la Nationale 7 avec une Simca marron qui s’approche doucement dans le cadre embué de la vitre arrière