dimanche 29 juin 2025

Il est difficile de fixer les yeux au large en marchant dans le sable fin car les orteils se prennent dans des chiquettes de filet vert aux reflets moirés. Ce ne sont pas des poussières d’étoile tombées de l’éternité du ciel. Ce sont des cartes postales remontées des bas-fonds d’une mer intérieure, des haillons de sirène détachés de la robe métallique de Laetitia Casta tandis qu’elle se faufile dans les entrailles du Louvre. Des chaussettes pailletées enfilées après la baignade s'échappent des étincelles au frottement de la bride des souliers. Elles se figent en cristaux de quartz au contact des grains de sable. Ces particules de feu se glissent dans l’eau pour la faire bouillir jusqu’à l’écume qui picote les chevilles. Puis elles montent au ciel avec les brumes de mer pour se condenser, au petit matin, sur les épaules nues de la nuit blanche.

lundi 23 juin 2025

La pluie gifle les feuilles et ruisselle lentement le long des branches marrons. Sa caresse fléchit les plus frêles qui suintent des larmes d’on ne sait quoi au pointillé de leur écorce. Puis elles décantent des mois durant sous la peau du printemps, encore granuleuse des cristaux glacés du matin. À la mesure du soleil qui grimpe dans le tube de mercure, elles se nourrissent du suc des sodas et reçoivent l’écho des guitares californiennes derrière la paroi de leur bathyscaphe. C’est dans ce tourbillon sensoriel que se gorge la chair blanche sous la bretelle du bikini. C’est en été que la bretelle cède sous les flèches du soleil, précipitant la vie en forme de poire dans la rosée des herbes hautes. C’est en été que la vie en forme de poire nourrit la vie en forme de sanglier.

vendredi 6 juin 2025

La toile est orange comme le crépuscule parce qu’au-delà, il n’y a rien. Une rangée de pissenlits danse à la lisière de l’écran comme des indiens en fête qui s’évanouissent dans les heures. La fumée glisse à l’infini de la cheminée, dans l’orifice caoutchouté du périscope, étiré par des tiges de bois jaunes cerclées de laiton. L’humidité de la terre se condense sous le fond de culotte en plastique gris. Ce minuscule empire de toile orange concentre le proche et le lointain, le jeune et l’ancien. Mustapha coupe des tranches de pastèque posé à même le schiste du parking, dans une bassine bleue pour ne pas souiller la France du jus de sa nourriture étrangère. Les suppliciées des paperbacks sont allongées à côté des martinets, avec leur manche de bois jaune et leurs nouilles de cuir noir enserrées d’un ruban de chatterton vert. C’est Pif et son gadget. Cindy est bien moins ébavurée sous son blister que les vaches et dindons dans leur sachet. Le plastique éternel donne l’illusion de l’enfance immortelle. C’est la bouée qui maintient à flot dans l’océan qui s’évapore. Sous le rosé des primevères, la lune est ceinturée de dentelle bleue nuit.

 

samedi 31 mai 2025

La toile noire du portrait de Blanche Neige est décorée, dans son coin supérieur gauche, d’un ovale rouge cinq francs. Blixa Bargeld raconte le sourire en noir et blanc de Giovanna, dans un ressac métallique sur le sol carrelé. De quoi ses talons sont-ils le son ? La viscose est une matière chimique artificielle, obtenue à partir de cellulose régénérée de végétaux comme le coton ou le bambou. Son drapé vaporeux est l’émanation de la sombre humidité nocturne tapie entre les arbres. La viscose est la sauvagerie de la forêt s’écoulant sur les sphères de la mondanité.

 

jeudi 15 mai 2025

il y a tout un continuum de fragrances entre la pluie de l’été et l’encaustique des pupitres la vie sent le cuir le parfum du cuir est celui de la vie emprisonnée au cœur du collagène les arbres tiennent dans la tempête grâce au lapacho qui les envigore en toute circonstance l’écorce s’éléphantise dans le matin de l’hiver pour préserver la tempérance du sang il monte comme dans un thermomètre jusqu’au plafond et déborde au printemps de couronnes de fleurs tendres qui lèchent la chlorophylle du ciel la divine souplesse est nichée au cœur de l’armure elle perle sous les entailles de canifs des gosses qui inventent le chewing-gum en faisant  rouler les perles translucides de sève dans leurs babines

dimanche 20 avril 2025

la dorsale wallonne prend sa source au cœur de la terre noire ses chevilles incandescentes sont mouchetées de gouttelettes de sirop de fraise elle escalade la roche grâce à ses pneus Pirelli et stationne le temps d’une pose en plein soleil avant de redévaler la pente à la poursuite de ses rails perdus dans la brume du petit matin gris c’est sur le marchepied que se dessine son parcours jusqu’au sommet de la fête à neuneu de la grand place l’entre jour de ses travées montre que ses hanches ne supportent pas la moindre dentelle cette fragile suspension remonte au petit matin gris de son école buissonnière en compagnie de trois goguenauds

vendredi 18 avril 2025

l’évolution des poupées de porcelaine vers les poupées de celluloïd s’est faîte par le bubble-gum des américains c’est suite à l’éclatement d’une bulle géante en plein visage que l’on perçoit la vertu de cette matière nouvelle pour lisser les fissures du temps on l’adopte donc immédiatement pour remplacer la tête cassante par une figure plus malléable mystère et boule de gomme quelques poupées de porcelaine échappent aux boules de gommes pour préserver leur mystère dans la forêt à l’écart de toute agitation elles perpétuent les manières ancestrales de décoction et de broyage de bleuets et autres plantes écorces feuilles argiles dans des mortiers de pierre ou de bois dense suivant la nature des essences parées de leurs premières étoffes de velours vert pour mieux se confondre avec les feuillages elles s’emploient à replacer les cycles naturels au cœur du temps qui passe et si elles s'aventurent parfois au clair des villes c’est sur la pointe des pieds pour déjouer l’attention des brigades formées parmi les chiens tant elles savent que l’autre sait et quand cette prudence ne suffit pas à écarter la confrontation chacun peut être témoin du malaise sans réellement comprendre de quoi il s’agit