dimanche 1 décembre 2013

nous descendons jusqu’au centre du village en face du vieux cinéma derrière la porte de garage si l’autobus n’y est pas c’est qu’il faut le prendre plus bas de l’autre côté de la route au bout de l’éternité si la porte est fermée c’est que le chauffeur est parti boire une pinte il revient dans sa blouse d’instituteur marron avec une ceinture ton sur ton à boucle dorée piquetée de rouille il fait démarrer le moteur le tuyau crache sa fumée noire le mariage de l’eau et du feu le ferment de la machine qui se dilue en elle-même la tôle est couverte de suie qui reste chaude comme un terril endormi on peut en suivre la trace jusqu’à l’orifice dentelé du gros tuyaux de tôle qui souffle sa chaleur à l’odeur de transmutation le joint de caoutchouc se décolle la porte s’ouvre on s’engouffre dans la machine comme dans un ventre au pays il y a le mazout le mazout est le ferment de la machine qui se dilue en elle-même le pays est entré dans la culture autrement dit dans le culte du sentbon on croit s’en sortir par la mathématique en remplaçant (eau + feu = ferment) par (eau + feu + sentbon = ferment + sentbon) mais dans la pratique ce n’est pas si simple le sentbon n’est qu’un piètre cache-misère qui remplace la rondeur entêtante du ferment par une âcreté aiguë génératrice de maux de tête et de maladies neurologiales dont le symptôme le plus répandu est une atrophie symétrique du cœur et l’esprit qui se ratatinent tous deux comme le même gant de toilette au pays se développent ainsi une méchanceté minuscule une bestialité assise le fracas ridicule d’un chien qui aboie derrière une grille les oiseaux ne mangent pas de ce pain là les oiseaux ont la beauté des danseuses russes les oiseaux ont le sourire imbécile la béatitude de porcelaine des derviches glisseuses les oiseaux font la mouette supernova une rose we want freedom

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